Bien chers frères et sœurs,
«Ventre affamé n’a point
d’oreilles » disait Jean de La Fontaine. Et on en connait, des
« jusqu’au-boutistes »! Ces gens parfois sans manières qui ne vous lâchent
pas avant d’avoir obtenu ce qu’ils désirent. Ils sont nombreux dans les rues de
nos cités, villes et villages. Leur expérience de vie `fini par les convaincre qu’il
faut parfois s’accrocher pour obtenir ce qu’on cherche. Mais il est difficile
ce métier, puisque c’est parfois au prix d’humiliations qu’on arrive à
décrocher ce qu’on désire.
Il
faut faire preuve de ténacité, d’endurance et apprendre à ne pas se prendre
trop au sérieux. La Cananéenne l’avait bien compris, elle qui aimait tant sa
fille et qui désirait sa prompte guérison. De voir sa fille tourmentée par le
démon la rendait elle aussi malade. Étrangère, païenne de surcroit et fille
d’un peuple à jamais exclu, elle voulait tout de même tenter sa chance! Et en
abordant Jésus, elle l’appelle « fils de David », ce qui signifie
« Messie », c’est-à-dire le Sauveur du monde.
Mais
Jésus reste silencieux, imperturbable. Une boutade ne dit-elle pas qu’on répond
à un sot par le silence? Mais sachant ce qu’elle cherchait, cette femme ne se
laissera pas abattre par ce glacial silence de Jésus. Et les disciples, choqués
quelque peu de l’attitude de Jésus face à une demande aussi légitime, mais
surtout agacés par les cris de cette femme sans gêne, le conjurent à donner
satisfaction à sa demande. La réponse de Jésus, étonnamment déconcertante,
aurait pu éloigner cette étrangère médusée.
Notons
que c’est par amour pour sa fille qu’elle ose s’approcher de Jésus d’un ton
insistant. Et pour la décourager définitivement, Jésus, sur un ton lapidaire,
lance : « Il n’est pas bon de prendre le pain des enfants pour le
donner aux petits chiens ». Qui de nous, malgré son indigence, accepterait
de s’entendre appeler « petit chien ? » Mais c’est sans doute
pour susciter la foi chez cette femme, dont la confiance inaltérable est déjà
le gage, que Jésus se montre réticent. Croyante, elle est persuadée pour sa
part que sa requête ne restera pas sans
réponse.
Pour
preuve, elle n’interprète pas le silence de Jésus comme un refus, un rejet.
Voilà pourquoi elle continue de crier sa misère jusqu’à ce qu’elle soit
entendue. Pour Matthieu, cette femme païenne est un modèle de « grande foi »
qui est mise en contraste avec le « peu de foi » des disciples de Jésus, mais
aussi celui de tous ceux et celles qui marchent à la suite du Christ. C’est
dire que si les silences de Dieu peuvent
nous pousser au retranchement, il reste qu’ils nous parlent dans un langage qui
ne nous exile pas loin de sa présence.
Enfin,
avec l’élan d’amour et la spontanéité d’une mère qui veut la guérison
de sa fille, avec l'humilité et l’assurance
d'une croyante, elle trouve des mots justes pour dire sa foi :
« C’est
vrai Seigneur, mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui
tombent de la table de leurs maître. » Tout est dit. La foi de cette femme
est entière. Une foi qui déborde les limites d’une appartenance juive ou
païenne. Et c’est cette foi seule, qui est le chemin du salut pour tout être
humain, quel qu’il soit. Ainsi, si la foi nous ouvre à la vie de Dieu, son
amour nous conduit vers les autres, pour
qu’ensemble nous goûtions la joie de croire.
Sébastien Bangandu, aa
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