vendredi 15 août 2014

Homélie du 20e dimanche ordinaire A : Le tourment d'une mère...



Bien chers frères et sœurs,

«Ventre affamé n’a point d’oreilles » disait Jean de La Fontaine. Et on en connait, des « jusqu’au-boutistes »! Ces gens parfois sans manières qui ne vous lâchent pas avant d’avoir obtenu ce qu’ils désirent. Ils sont nombreux dans les rues de nos cités, villes et villages. Leur expérience de vie `fini par les convaincre qu’il faut parfois s’accrocher pour obtenir ce qu’on cherche. Mais il est difficile ce métier, puisque c’est parfois au prix d’humiliations qu’on arrive à décrocher ce qu’on désire. 

Il faut faire preuve de ténacité, d’endurance et apprendre à ne pas se prendre trop au sérieux. La Cananéenne l’avait bien compris, elle qui aimait tant sa fille et qui désirait sa prompte guérison. De voir sa fille tourmentée par le démon la rendait elle aussi malade. Étrangère, païenne de surcroit et fille d’un peuple à jamais exclu, elle voulait tout de même tenter sa chance! Et en abordant Jésus, elle l’appelle « fils de David », ce qui signifie « Messie », c’est-à-dire le Sauveur du monde. 

Mais Jésus reste silencieux, imperturbable. Une boutade ne dit-elle pas qu’on répond à un sot par le silence? Mais sachant ce qu’elle cherchait, cette femme ne se laissera pas abattre par ce glacial silence de Jésus. Et les disciples, choqués quelque peu de l’attitude de Jésus face à une demande aussi légitime, mais surtout agacés par les cris de cette femme sans gêne, le conjurent à donner satisfaction à sa demande. La réponse de Jésus, étonnamment déconcertante, aurait pu éloigner cette étrangère médusée. 

Notons que c’est par amour pour sa fille qu’elle ose s’approcher de Jésus d’un ton insistant. Et pour la décourager définitivement, Jésus, sur un ton lapidaire, lance : « Il n’est pas bon de prendre le pain des enfants pour le donner aux petits chiens ». Qui de nous, malgré son indigence, accepterait de s’entendre appeler « petit chien ? » Mais c’est sans doute pour susciter la foi chez cette femme, dont la confiance inaltérable est déjà le gage, que Jésus se montre réticent. Croyante, elle est persuadée pour sa part que sa requête ne restera  pas sans réponse. 

Pour preuve, elle n’interprète pas le silence de Jésus comme un refus, un rejet. Voilà pourquoi elle continue de crier sa misère jusqu’à ce qu’elle soit entendue. Pour Matthieu, cette femme païenne est un modèle de « grande foi » qui est mise en contraste avec le « peu de foi » des disciples de Jésus, mais aussi celui de tous ceux et celles qui marchent à la suite du Christ. C’est dire que  si les silences de Dieu peuvent nous pousser au retranchement, il reste qu’ils nous parlent dans un langage qui ne nous exile pas loin de sa présence. 

Enfin, avec l’élan d’amour et la spontanéité d’une mère qui veut la guérison de sa fille, avec l'humilité et l’assurance  d'une croyante, elle trouve des mots justes pour dire sa foi : « C’est vrai Seigneur, mais justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maître. » Tout est dit. La foi de cette femme est entière. Une foi qui déborde les limites d’une appartenance juive ou païenne. Et c’est cette foi seule, qui est le chemin du salut pour tout être humain, quel qu’il soit. Ainsi, si la foi nous ouvre à la vie de Dieu, son amour  nous conduit vers les autres, pour qu’ensemble nous goûtions la joie de croire.
 
Sébastien Bangandu, aa

Aucun commentaire: