Bien chers frères et sœurs,
« Partir
c’est mourir », disait le frère Luc, moine de Tibhirine. Cela
est vrai, dans une certaine mesure. Même si aujourd’hui, avec
les moyens de communication modernes, les départs peuvent être vécus
différemment, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit là d’une chose douloureuse,
parfois difficile à vivre. Partir c’est perdre des amis, des habitudes, des couleurs,
des odeurs qui ont marqué notre vécu quotidien en un lieu précis et d’avoir peu
de chance de les retrouver. C’est aussi s’éloigner de ceux et celles qu’on
aime, avec l’appréhension de ne plus les revoir.
Mais si
Celui qui part est "Jésus ressuscité", alors le sens du verbe "partir"
devient autre, puisque tout est mû au rythme de la résurrection. Ainsi, si c’est
"Jésus ressuscité" qui part, alors le verbe partir ne signifie plus le
fait de quitter, d'abandonner les siens, ou d'être désormais absent. Non, Jésus
n'est pas un aventurier qui nous assurerait de sa résurrection, pour se contredire
au bout du compte en nous disant que cela n’est pas vrai parce qu'il s'en va et
que nous n'avons qu'à nous en prendre à nous-mêmes.
Il n’en
est pas question puisque Luc affirme dans la première lecture qu’"Il
reviendra comme vous l'avez vu s'en aller au ciel". En effet, Jésus-Christ
s’en va comme celui qui est extérieur à nous, pour revenir à l’intérieur de
nous. En partant vers son Père et notre Père, Jésus nous apprend qu’on ne peut pas
vivre pleinement sa vie de chrétien en reniant ce qui nous
fonde : notre appartenance au Père.
Nous
comprenons alors qu’être chrétien c’est avant tout un art de vivre, une manière
d'être et d’habiter le monde, qui rend heureux, puisqu’elle nous tourne vers le
Père. Et quand on vit tourné vers le Père, la réalité quotidienne, dans sa
banalité, devient du coup une épiphanie, une manifestation de Dieu. C’est cela
le miracle. En effet, le miracle c’est toi et moi quand nous nous laissons
traverser par la Parole de Jésus Christ.
Notre monde est de plus en plus marqué
par la mobilité. Il invite le disciple à prendre conscience d’être au service
d’une Église sans domicile fixe (Alain Roy). Le
Christ, loin de nous inviter à l’installation, nous appelle
plutôt à la disponibilité. De ce point de vue, l’Ascension se trouve être un
heureux départ. Départ du Christ qui permet aux disciples d’aller au-delà
d’eux-mêmes, de franchir les limites de l’impossible grâce à l’assistance de
l’Esprit, pour devenir passeurs de Dieu, témoins du Christ ressuscité.
Enfin,
le départ de Jésus nous met en route. Puisque répondre à l’appel du Christ ne
s'arrête pas au petit monde qui est à portée de nos mains. Il nous appelle à
mêler notre chair habitée par l'Esprit du Seigneur avec la chair du monde de
notre temps. Et c’est là que, mis au parfum de l’odeur du Ressuscité que nous
exhalons, les gens pourront alors manifester librement leur désir de renaître
en Jésus Christ.
Sébastien
Bangandu, a.a.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire