Bien chers frères et soeurs,
C’est
face à un manque à combler que Jésus a été amené à opérer le premier miracle de
son ministère pastoral, alors même que son heure n’était pas encore venue. En voyant
vivre les humains de notre temps, on est parfois touché par ce manque qui les
habite. Malgré notre déni de façade, malgré
le refoulement induit par nos sociétés modernes, l’humain reste toujours habité par
un désir de plénitude, de bonheur, de complétude.
Jésus, en tant que Rédempteur
et sauveur du genre humain, veut toucher précisément ce qui constitue un
manque, ce qu’il y a en nous de plus fragile, ce qui dit mieux la vérité de
notre être blessé, de notre misère. Alors que nous
avons tout au niveau matériel, nous sommes tristes et insatisfaits à
l’intérieur : il nous manque quelque chose. Et là où nous sommes
pauvres, là où nous sommes nus, là où n’avons de reste qu’un peu d’eau pour ne
pas mourir, c’est là que Dieu vient nous combler de vitalité. Et en touchant le
cœur de notre être, il vise à nous transformer secrètement pour nous ouvrir à
une vie plus digne.
Marie
est notre intercesseur auprès de son fils. En formulant sa requête, Marie
demande à Jésus, jusque-là méconnu de beaucoup, de naître à la vie publique, de
passer du silence à la parole, de se manifester en mettant en œuvre la force de
sa parole créatrice. Et la résistance de Jésus est légitime, dans la mesure où
il a la conscience vive des conséquences de sa manifestation. En fait, en se
manifestant, Jésus va ainsi inaugurer sa mission, laquelle le conduira à la
glorification. Bien plus, Marie se
souvient encore de sa trouvaille avec Jésus au Temple de Jérusalem, lorsqu’il déclarait qu’il devait être au service de son
Père.
Désormais,
Marie est convaincue que l'heure est venue de demander à l’envoyé du Père de
manifester le pouvoir de la parole créatrice. Les propos de cette femme qui
gardait tout dans son cœur (Lc 2, 51) atteignent son fils au plus profond de
son être de fils de Dieu et de Marie. Mélange d’attention bienveillante et du
regard maternel de la mère sur la vie de ses enfants, sa demande trouvera écho
dans le cœur de son fils. Et pour éveiller les disciples à la foi en ce dernier,
Marie leur enjoint de faire tout ce que Jésus leur dira. Ce faisant, elle
symbolise le nouvel Israël, dont elle exprime l'être profond par le conseil de
fidélité à l'Évangile qu'elle prodigue aux serviteurs.
Décidemment,
cette recommandation de Marie est une invitation à adopter vis à vis de Jésus
l'attitude de l'Alliance, celle de l'obéissance inconditionnelle à la volonté
de Dieu. Et dans sa démarche, il convient de noter que Marie n’intime aucun ordre
à son fils. Elle se contente plutôt d'attirer son attention sur la situation de
manque tout en manifestant sa confiance aux potentialités cachées de Jésus, aux
virtualités dont il est porteur en tant que parfaite image du Père.
Il
faut noter par ailleurs qu’à cette merveilleuse fête de Cana, on n'aperçoit pas
directement les mariés. Toute la compassion de Jésus se porte vers la
communauté des invités, rassemblée pour la fête et menacée de dispersion faute
de vin, ce vin qui « réjouit le cœur de l’homme » (Ps 104,14). De
plus, la mère de Jésus semble bien s'exprimer au nom de ces convives, se
faisant en quelque sorte leur porte-parole. C'est que dans sa maternité physique,
Marie résume et représente la communauté messianique que nous formons. Enfin,
l’action accomplie par Jésus le situe d'emblée hors du commun et le distingue
ainsi du reste des gens. Désormais, Jésus est connu comme une personne
d’exception, un homme hors du commun dont les actes revitalisent et
épanouissent les humains. Ouvrons nos
cœurs à sa rencontre car il est encore aujourd’hui capable de combler nos
manques et de nous réhabiliter dans notre humanité.
Sébastien Bangandu, aa
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